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  lundi 25 mars 2019
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Éducation et handicap

La discrimination du berceau au boulot.

« Cette enfant était aussi une grâce, elle m'a aidé à dépasser tous les échecs et tous les hommes, à voir plus haut. »

Le Général Charles de Gaulle, 1940

1 État des lieux :

En guise d'introduction :

« Il serait important que l'ensemble des moyens humains et financiers actuels soient placés sous la responsabilité du Ministère de l'éducation Nationale. »

Mme Catalinat Devandas-Aguilar ( Rapporteuse spéciale des Nations Unis sur les droits des personnes handicapées ) dans ses observations préliminaires du 13 octobre 2017.

Cette seule phrase est par elle-même est une façon de dire que les fondements de la prise en charge de l'éducation des personnes en situation de handicap en France est à revoir.

Diplomatiquement certes, mais de manière implicitement claire.

1.1 Discrimination à la scolarisation :

La loi du 11 février 2005 sonnait comme une révolution dans la reconnaissance du droit de chaque enfant à une éducation inclusive.

Cela s'est clairement vu dans des campagnes de communication de la part de l'État et des Collectivités Territoriale.

Il y a eu tout de même de réels efforts :

L'Éducation Nationale a renforcé les unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS) et la mise à disposition d'auxiliaires de vie scolaire (AVS).

Des associations de type « Service d'Education Spéciale et des Soins A Domicile » (SESSAD), offre des accompagnements.

Le Ministère des Solidarités et de la Santé finance des établissements et services médico-sociaux (ESMS) qui ont pour particularité d'être gérés par des associations.

Mais ces mesures ont leurs limites.

Entre les questions d'accessibilité des infrastructures, l'absence de formation des AVS comme des enseignants, et des méthodologies inadaptées, les enfants scolarisés dans l'enseignement général se retrouvent bien souvent en échec ou en déscolarisation.

Pire, la multiplication d'acteurs et d'associations, la prise en charge et le suivi éducatif des enfants peut devenir facteur d'échec du fait de l'absence de coordination.

Mais le plus grave est l'incapacité totale de l'État à pouvoir chiffrer le nombre total d'enfants handicapés (hormis ceux recensés par l'Éducation Nationale puisque scolarisés) et donner à un instant t la situation d'un enfant.

Malheureusement, du moment qu'un enfant est aiguillé vers les ESMS, il sort totalement du suivi de l'Education Nationale.

Comme l'actualité le montre, malheureusement, certains de ces établissements ne remplissent pas ou peu leur rôle (lorsqu'on n'y constate pas d'actes de maltraitance).

Et de nombreux enfants sont alors abandonnés en institutions dont la priorité ne va pas à l'éducation ou l'épanouissement avec un recours constant à la solution médicamenteuse.

1.2 Discrimination dans le handicap :

Il n'existe pas de handicaps plus graves que d'autres.

Les enfants handicapés et leurs familles sont unis dans une même souffrance.

Par contre, on constate une inégalité de traitement entre différents handicaps.

On constate un effort régulier apporté aux handicaps auditifs, visuels, moteurs, maladies dégénératives et même plurihandicaps.

Effectivement, ce sont des handicaps visibles, plus facilement compréhensibles pour le citoyen lambda et que l'on peut aider ou compenser avec des solutions techniques ou humaines.

Dès lors, la scolarisation en enseignement général sera facilitée.

Mais il n'en va pas de même pour les handicaps trop souvent et à tort qualifiés de mentaux.

La déficience intellectuelle, l'autisme (et autres troubles du spectre autistique : TSA), les troubles envahissant du développement (TED), les handicaps psychiques, les troubles Dys, les traumatisés crâniens, ou pire, les polyhandicapés ne bénéficient pas de la même approche.

Que ce soit la mécompréhension (incompréhension ou méconnaissance ?) généralisée, le manque de formation des différents intervenants, les mauvais diagnostics ou la prise en charge inadaptée, voire la peur, autant de facteurs qui vont souvent conduire doucement au placement en Centre Hospitaliers Spécialisés ( CHS ) de jeunes disposant de capacités d'apprentissages et d'un potentiel d'emploi.

C'est cette discrimination qui fera que cette seconde typologie de handicap occupera une plus grande partie des réflexions à venir.

1.3 De la communication mais pas de formation :

Régulièrement, des campagnes de sensibilisation sont financées, mais il semble que leur impact se limite à communiquer sur l'implication de l'État ou des Collectivités.

Les familles des enfants handicapés, pour une grande majorité, ne sont pas informées de leurs droits et des dispositifs à leur disposition.

Un grand nombre d'enseignants, voir de directeurs d'établissement, relevant de l'Éducation Nationale ou du Ministère de l'Agriculture pour la Formation Agricole ne sont pas informés des droits des élèves en situation de handicap.

Épreuves aménagées, rallongement de la durée de formation et adaptations du cursus par dérogations, etc … autant de notions dont ils n'ont aucune connaissance.

Il y a même souvent confusion entre les différents dispositifs (PAI/PPA/PAP/PPRE) dans l'esprit des établissements.

Souvent, ce sont les parents qui auront la chance d'être au courant des droits de leurs enfants qui transmettront l'information aux enseignants ou directeurs d'établissements.

Dans les pires cas, les parents feront face à l'incrédulité et devront eux même s'adresser à la Maison Départementale des Personnes Handicapées ou au Rectorat pour se voir donner gain de cause.

1.4 Privatisation des enfants handicapés :

L'État a fortement délégué et financé vers les structures associatives (SESSAD et ESMS).

Or, de par la nature même de ces associations, l'État perd rapidement toute visibilité sur le fonctionnement et par conséquent sur la situation des enfants.

Comme dans les affaires d'ESAT ou le récent scandale de l'IME de Moussaron, on constate qu'à défaut de salariés très courageux, ces établissements devenus des boites noires échappent à tout contrôle.

1.5 Une éducation face à la porte fermée de l'emploi :

Comme abordé dans la partie emploi, les préjugés, la méconnaissance du droit et des aides à l'emploi sont les principaux obstacles.

Si malgré les dispositifs d'accès à l'emploi actuels, trouver un emploi adapté à ses compétences relève de la gageure, l'accès à l'apprentissage ou la formation en alternance est quasi impossible.

Sachant que pour un grand nombre de handicaps, ces deux types de formations sont les seules voies de formation envisageables, nous arrivons dans une situation ubuesque :

Des jeunes handicapés ont réussi à suivre des études malgré tous les obstacles imaginables et ont un niveau leur permettant d'accéder à l'apprentissage ou l'alternance, mais se voient exclus faute d'accompagnement lors de cette phase importante.

Cette exclusion est souvent source de régression (faute de stimulation) et de dé-socialisation.

1.6 L'enseignement supérieur, une quête du Graal :

Si pour les handicaps les plus facilement acceptés, le combat est parfois difficile pour accéder à l'enseignement supérieur ou aux Grandes Ecoles, une barrière de barbelés apparaît pour d'autres.

Pour la déficience intellectuelle, l'autisme ( et autre troubles du spectre autistique : TSA ), les troubles envahissant du développement ( TED ), les handicaps psychiques, les troubles Dys, les traumatisés crâniens, ou, les polyhandicapés la sentence tombe très vite.

Dès le diagnostic, il apparaît pour beaucoup comme une fatalité que ces jeunes ne pourront déjà que très difficilement suivre une scolarité en primaire ou pire secondaire.

Alors, imaginer un accès à l'enseignement supérieur relève du fantasme.

Quelques praticiens se risquent parfois à dire aux parents que l'enfant autiste ou dysorthographique pourra avec le bon suivi, traitement et volonté attaquer une École Préparatoire Vétérinaire aux risques de se voir noyé sous un flot de larmes.

2 La scolarité des enfants handicapés de demain :

Paradoxalement, la Loi du 11 février 2005 et le Code de l'Éducation fixe déjà un objectif clair : Le droit de chaque enfant à une éducation inclusive.

Nul besoin de chercher plus loin, l'objectif reste le bon.

2.1 Maîtriser le sujet :

A minima, l'État doit connaître le nombre exact des enfants concernés sur son territoire.

Il doit pour garantir le respect du droit des enfants handicapés maîtriser les différentes problématiques auxquelles ils sont confrontés.

2.2 L'inclusion, un droit opposable :

A défaut que l'Éducation Nationale puisse démontrer un impossibilité totale de scolarisation argumentée par une commission pluridisciplinaire, celle-ci a obligation de veiller à l'éducation de tous les enfants en situation de handicap.

2.3 Un parcours adapté et ajustable :

Dès le début de la scolarisation, l'enfant handicapé doit disposer d'un plan de formation dont le suivi est assuré par une équipe pluridisciplinaire qui saura ajuster celui-ci en fonction de l'évolution de l'enfant afin de ne plus avoir de trous dans le suivi ; principale cause de régression ou décrochage.

Ce plan doit dans la mesure du possible se projeter, au final jusqu'à l'enseignement supérieur.

2.4 Un projet de vie :

A l'issue du plan de formation, des objectifs professionnels et sociaux doivent être posés.

Ce qui implique l'accès à l'emploi à l'issue du parcours, seule garantie d'inclusion sociale.

3 Les propositions :

Afin d'arriver à l'objectif défini, voici les principaux axes d'améliorations pour amender la loi du 11 février 2005.

3.1 Rétablir l'école de la République pour les enfants handicapés :

L'Etat, pour coordonner efficacement les moyens et le suivi élèves, doit centraliser ceux-ci.

Concrètement, l'éducation d'enfants handicapés doit relever d'une seule et unique entité : l'Éducation Nationale, unique garante de l'éducation des enfants sans distinction de couleur, religion ou handicap.

Elle est responsable du plan de formation et du projet de vie de chaque élève.

Ce qui implique le démantèlement progressif des ESMS et SESSAD, et, le transfert de la compétences de la MDPH vers l'Éducation Nationale.

3.2 Apport de compétences à l'Education Nationale :

Par l'arrêt progressif des structures associatives et la ré-allocation des financements existant vers l'Éducation Nationale, celle ci peut financer la présence d'équipes pluridisciplinaires de proximité.

Ces équipes en collaboration avec les enseignants et les familles permettront la mise ne place du plan de formation.

Elles peuvent aussi participer à la précision du diagnostic lorsque les premiers soucis apparaîtront.

Elles ont aussi vocation à informer les familles des droits de leurs enfants et des dispositifs de prise en charge susceptibles d'aider leurs enfants.

3.3 Règle d'or :

Pour garantir l'inclusion, une règle simple doit être appliquée si elle représente un besoin pour le bon déroulement de la scolarité :

1 Poste d'AVS / 1 Élève handicapé

Les élèves doivent rentrer dans un calcul pondéré des effectifs de classe pour tenir compte des capacités des enseignants.

Lorsque l'inclusion totale n'est pas envisageable, chaque établissement doit disposer d'au moins une classe adaptée sur l'ancien modèle des unités locales d'inclusion scolaire ( Ulis ) encadrée par un enseignant spécialisé et accompagné de l'équipe pluridisciplinaire de proximité.

Ces classes doivent rester une exception temporaire pour les élèves, hormis les enfants qualifiés de « Sans Solution » pour lesquels une stimulation et un encadrement permanent sont susceptible de développer des progrès sur du long terme.

3.4 Formation des formateurs :

Pour une prise en charge adaptée en inclusion des enfants handicapés :

Création d'un cursus de formation d'AVS.

Inclure un module « Handicap » dans tous les cursus d'enseignants.

Journées pédagogiques spécifiques pour les enseignants en poste et l'encadrement des établissements.

Création d'un cursus de formation d'enseignants spécialisés.

3.5 Garanties d'accessibilités et de moyens :

Les établissements pour être réellement accessibles doivent disposer d'infrastructures, non seulement pour la prise en charge des personnes à mobilité réduite (là ou un réel effort à été réalisé), mais aussi pour mal/non voyants (affichages adaptés, repères de déplacement en braille) ou pour les mal-entendants ( boucles d'induction ).

Il faut aussi fournir les moyens en complément des AVS:

Supports pédagogiques adaptés.

Équipements Braille.

Classes bilingues en langue des signes françaises ( LSF ).

Équipements informatiques d'assistance .

3.6 Adapter les méthodologies :

Pour les handicaps d'origines neurologiques, l'adaptation des modes d'apprentissage doit être menée pour que les élèves puissent suivre convenablement leurs programmes.

3.7 Niveler par le haut :

Il faut partir d'un prédicat de base dans lequel tout enfant peut, dans un avenir plus ou moins distant, atteindre l'éducation supérieure et surtout l'emploi.

L'équipe de suivi a le devoir de placer les curseurs toujours un peu plus haut au niveau de plan de formations et du projet de vie.

Un obstacle ponctuel, un blocage ou une régression ne doivent pas sceller le destin d'un enfant.

3.8 Accompagner vers l'emploi :

L'équipe de suivi doit aussi savoir accompagner les élèves lors de leurs démarches de recherche de stage, d'apprentissage ou d'alternance.

Les employeurs potentiels ont besoin d'explications que le jeune ne sera pas forcément en mesure de donner seul.

De même, la garantie d'un suivi régulier peut être un élément rassurant pour l'employeur potentiel.

L'employeur et l'élève doivent aussi être accompagnés lorsqu'il s'agit d'adaptations spécifiques (temps de travail, adaptations de postes, etc … ).

Les mesures incitatives doivent clairement être clairement révisées surtout pour les PME et TPE qui prennent le plus de risque dans la démarche d'aide à la formation de jeunes en situation de handicap.

3.9 Désinstitutionnalisation des enfants handicapés :

Conformément au recommandations des Nations Unies et aux méthodes pratiquées chez certains de nos voisins : aucun enfant ne doit être placé en CHS sauf à justifier de troubles psychiatriques propres à faire de lui un danger pour lui-même ou autrui.

3.10 Veiller au respect des droits des enfants handicapés :

Afin de contrôler la stricte application des droits à l'éducation des enfants en situation de handicap et de suivre les éventuelles plaintes de familles ou de membres du corps enseignant, il est nécessaire qu'une entité indépendante de l'Éducation Nationale soit mise en place sous le contrôle du secrétariat au handicap.

4 Vers un Plan Handicap :

La France a conscience d'une bonne partie des enjeux liés au handicap/

La population est globalement sensibilisée.

Mais, il semble que l'État n'ait pas encore trouvé le bon angle d'attaque et les bons outils.

Par exemple :

Les définitions utilisées par la Haute Autorité de Santé ( HAS ) ne tiennent pas compte des évolutions de l'état de l'art reconnu de certains handicaps.

La représentativité des personnes ou associations consultées lors des différents débats est souvent discutable face à l'état de l'art de certaines « pathologies » (présence de lobbyistes pro-psychiatrie et pro-institutionnalisation auprès de l'HAS et autour du Plan Autisme 4) .

Pire encore, on notera le cas du Centre Expert Autisme Limousin (CEAL).

Malgré l'appréciation de « travail de haute couture » reconnu par l'ARS Aquitaine, celle-ci souhaite voir une réduction drastique du budget dédié au CEAL au sein du CHU de Limoges sur le motif que celui-ci représente une « inégalité territoriale » par rapport aux autres territoires dont les centres ressources autisme (CRA) sont moins performants.

Il s'agit là, clairement, d'un nivellement par le bas.

La France a besoin de recréer globalement sa politique d'inclusion du handicap dans un projet cohérent et juste.

Le cloisonnement des missions par type de handicap montre depuis plus vingt ans son incapacité à faire progresser la situation.

Pour se faire, la France doit savoir reconstruire intégralement sa politique d'éducation des personnes handicapée en reprenant son rôle d'état providence.

C'est ce qui a été superbement résumé le 13 octobre dernier :

« La France est un pays de traditions fortes et de valeurs démocratiques et républicaines. L'idéal du modèle républicain français » Liberté, Égalité, Fraternité » doit présider à l'inclusion pleine et entière des personnes handicapées dans tous les domaines de la vie. La politique du handicap en France doit faire sien cet idéal, et fournir à toutes les personnes handicapées davantage de possibilités pour vivre comme elles l'entendent. »

Mme Catalinat Devandas-Aguilar ( Rapporteuse spéciale des Nations Unis sur les droits des personnes handicapées ) dans ses observations préliminaires du 13 octobre 2017.

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