Groupe départemental Education pour le Comité départemental de Générations Loire :
Redonner sa place à l’Education populaire
L’Education populaire tire son origine des Lumières où l’accès au Savoir est devenu, un des achèvements essentiels de l’Humain, vu comme l’ Homo cogitans, l’Humain pensant, donc dans une quête perpétuelle de la connaissance. D’ailleurs l’expression consacrée en Belgique est celle d’« Education permanente ». Néanmoins, la Gauche a marqué l’Education populaire au cours des années 20 et 30, où le courant de l’Education Nouvelle, crée par le Catalan Fransesc Ferrer quand il imagine en 1901, l’Ecole moderne, délivrée de l’emprise de l’Eglise catholique et visant à émanciper et amener les classes ouvrières et populaires à monter l’échelle sociale. Son influence partout en Europe et aux Etats-Unis a marqué le poète Federico Garcia Lorca avec son projet en 1931, « La Barraca » pour « amener le théâtre aux paysans analphabètes » des campagnes espagnoles. Les pionniers de la gauche française en matière d’Education populaire sont le radical de gauche Jean Zay (Ministre de l’Education Nationale et le socialiste Léo Lagrange, Secrétaire d’Etat aux Loisirs et aux Sports, tous deux ministres du Front Populaire, puis Pierre Mauroy qui a fondé en 1950, ce qu’est devenue une institution de l’Education populaire, la Fédération Léo Lagrange qui élabore des politiques éducatives, socioculturelles et d’insertion. A cela, on doit évidemment ajouter le Sport. Finalement c’est tout cela l’Education populaire :
Instruire, apprendre au-delà de son milieu social ou culturel, comprendre le monde, avoir l’autonomie de se former au contact des autres et d’aider à former les autres, de s’insérer socialement et philosophiquement comme citoyen doté d’esprit critique.
La formation initiale et continue
Tout individu, quel que soit son âge et son bagage, devrait pouvoir se former tout au long de sa vie, changer de métier ou continuer à se former selon ses aspirations ou ses besoins. Faute de moyens et de volonté politique, les outils actuellement disponibles sont largement insuffisants et inadaptés aux besoins. Tout d’abord Il manque de passerelles, de formations complémentaires entre les formations initiales pour les jeunes qui veulent changer d’orientation ou se perfectionner. Il n’y a pas de véritable volonté politique d’intégration ou d’adaptation pour les élèves non scolaires, handicapés, migrants ou pour les enfants ayant des troubles de Dys.
Face au numérique, l’éducation est plus que jamais inégalitaire. Cela nous frappe de plein fouet avec la crise du COVID-19 où de nombreux enfants issus de milieux défavorisés n’ont les outils numériques pour faire leurs devoirs en ligne comme recommandé par l’Education Nationale. Comment faire quand il n’y a pas d’ordinateur à la maison ou un seul à partager entre plusieurs membres de la famille et lorsqu’il n’y a pas ou peu de connexion ?
En ce qui concerne les études supérieures, parce que personne n’a voulu anticiper la venue des baby-boomers des années 2000 et déployer les moyens nécessaires, il n’y a pas de places pour tout le monde dans les universités et grandes écoles pour poursuivre ses études. Parcoursup est donc le nouveau terreau de l’injustice sociale en matière d’éducation supérieure avec l’élitisme et la sélection par l’argent des Grandes Ecoles, laissant peu de chances aux enfants issus de milieu défavorisés ou des classes moyennes.
En matière de formation continue pour adultes l’expérience professionnelle ou personnelle (comme dans des associations par exemple) est insuffisamment prise en compte ou valorisée. Les salariés, artisans, auto-entrepreneurs, ouvriers agricoles etc… n’ont pas vraiment l’occasion matérielle ou le pouvoir de se former, sans doute qu’un Revenu Universel serait utile !
La place de l’Education populaire
C’est parce que l’Education (Nationale) laisse du monde sur le carreau que l’Education Populaire prend la relève à bras le corps. L’Education Populaire vise à accompagner les individus en partant de là où ils en sont et non pas de là où on voudrait qu’ils en arrivent, en les invitant au questionnement, en se raccrochant au réel et au vécu des personnes.
Il faudrait mettre en place dans chaque quartier un lieu dédié, avec un budget municipal dédié, pour l’Education populaire en lien avec les associations compétentes mais aussi avec les habitants volontaires. Un grand lieu de rassemblement dédié à l’Education populaire pourrait être réservé aussi dans chaque ville, comme par exemple les Bourses du Travail pour pouvoir faire des formations ou conférences à grand public ou des cours du soir par exemple.
Jusqu’à présent l’Education populaire servait de roue de secours à un service éducatif déficient ou inadapté. Aujourd’hui l’Education Populaire devrait faire partie de l’Education et non pas être relayée à un service de seconde zone. Pourquoi l’Education Populaire et les autres instances de l’Education ne travailleraient pas en étroite collaboration pour mettre en place des « formations complémentaires ou de l’éducation complémentaire » ? Etablir des passerelles encore et toujours… s’enrichir des expériences mutuelles et complémentaires car là ou l’Education (nationale) encadre notre façon de penser et d’agir, l’Education Populaire s’évertue à libérer l’imagination, l’envie, la créativité et l’audace qui vont permettre la transformation personnelle et sociale de l’individu. Pourquoi vouloir continuer à dissocier ces deux formes d’éducation alors qu’elles sont complémentaires et permettraient à de nombreux individus de trouver leur voie.
La question artistique
Toutes les formes artistiques, que ce soit le spectacle vivant : théâtre, spectacles, le cinéma, les arts plastiques, la musique, qu’ils soient « classiques » ou « avant-gardistes » (forme contemporaine des arts) sont un des piliers de l’Education populaire et une expression plus que riche et variée. La France a la chance depuis longtemps, avec sa politique associative (Loi 1901 sur les associations) mais aussi ses festivals de la plus petite à la plus grande échelle (Festival de Cannes, Festival d’Avignon, Francofolies, Biennale du Design à Saint-Etienne…) et les artistes, écrivains, auteurs-compositeurs, intermittents du spectacle en sont les auteurs principaux. Force est de constater que cela fait longtemps depuis le Ministère d’André Malraux sous Charles De Gaulle (qui a créé le Ministère de la Culture en 1959) et le Ministère sous François Mitterrand de Jack Lang (qui a créé le Festival mondial de Théâtre de Nancy en 1963 et la Fête de la Musique en 1981), que la Culture n’a pas été au centre des politiques nationales gouvernementales, la Crise de 2008 ayant achevé de mettre au dernier rang (avec le Sport) cette émanation de l’Humanité et son inventivité. On a relégué aux Collectivités Territoriales cette prérogative, même si l’action publique nationale n’est pas vaine : Directions Régionales à l’Action Culturelle, Scènes nationales, il n’en demeure pas moins que le vrai renouvellement, celui du tournant festivalier au cours des années 80-90 s’est largement fait par le biais du soutien des Régions, Départements et Collectivités urbaines.
Cependant la « filière territoriale » culturelle et sa politique volontariste de financement s’épuise de plus en plus, du fait que l’Etat demande toujours plus aux Collectivités de modération budgétaire (On voit là, le manque cruel d’approfondissement de la Décentralisation depuis 1982 de par l’Etat et l’effacement de plus en plus important d’une politique nationale et publique artistique). La crise sanitaire du Covid-19 a fini d’achever l’illusion d’un Etat volontariste en la matière, ne pouvant que prémunir des pots cassés. Rappelons que le Ministère de la Culture au niveau national, ne bénéficie que de 250 millions d’euros par an, ce qui est très peu, à cela il faut ajouter le fléchage du Budget général en direction des Collectivités et une aberration en terme d’inégalités territoriales, puisque 73% de ces deux milliards vont à Paris intra-muros et 11% pour l’Ile de France, donc qu’il ne reste que 16% soit 320 millions pour les autres régions… Cela pointe le besoin essentiel d’une gouvernance concertée et avec le budget nécessaire, venant de l’Etat (cela veut dire le doublement du budget ministériel, des crédits fléchés avec rééquilibrage régional) et des Collectivités (cela suppose que l’Etat ne demande plus la modération dans ce domaine, ni celui du Sport amateur) entre les associations artistiques, les directions de festivals, les coordinations d’intermittents du spectacle et d’artistes et le Ministère, rue de Valois et sous une forme conjointe et décentralisée avec les Collectivités. Une double impulsion en somme, pour le renouvellement de la question artistique en France.
La question sportive
On a parlé du recul d’une politique approfondie d’Education populaire, en matière artistique, alors que le Ministère de la Culture a un budget et des crédits additionnés de près de 2,3 milliards, le Budget des Sports, lui ne compte que près d’un milliard d’euros dont seulement 500 millions en part active (les autres 500 millions relevant de frais de fonctionnement liés notamment, aux salaires des fonctionnaires), on peut ajouter à cela la Taxe Buffet (près de 74 millions d’euros) sur les droits télévisuels sportifs, dont seulement 54% et non 100% (40 millions d’euros) aux Sport. Clairement le Sport et la politique de Service Public du Sport est sous dotée, si on ajoute à cela la volonté d’agression de la Ministre Roxana Marcineanu les Conseillers Techniques Sportifs (volonté de privatiser le statut de Conseillers Techniques Sportifs ou CTS) dont beaucoup sont missionnés auprès des associations sportives ou sinon auprès des Fédérations. Et ce n’est pas l’obtention des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 qui a changé la donne macroniste. D’ailleurs, Jean-Michel Blanquer a annexé à son Ministère la Jeunesse et les Sports, alors que depuis longtemps, cette administration était liée aux Sports et travaillait avec l’Education Nationale. Au contraire de tout cela, une politique ambitieuse, pour ne pas dire une revitalisation du Service public du Sport semble indispensable. Ce qui implique le fait de porter une ambition du Sport pour tous, avec une large diffusion, en aidant les clubs sportifs donc en les dotant davantage, en favorisant davantage l’EPS en passant de 2 à 4 heures par semaine et en augmentant le coefficient aux examens et en développant le Sport bien-être (incitation à de tels programmes dans les clubs). On peut aussi profiter de la labellisation « Terre de Jeux 2024 » pour profiter de créer de nouveaux projets sportifs territoriaux et clairement viser le doublement du Budget des Sports, ainsi que le retour de Jeunesse et Sports dans le giron du Ministère des Sports.