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Les germes du modèle agricole de demain, agro-écologie et agriculture paysanne

Qui peut vivre sans se nourrir ? Domaine économique dont dépend directement la vie des hommes, l'agriculture est une activité humaine en interface constante avec la nature, totalement liée au milieu et à l'environnement, et qui les impacte fortement. C'est un secteur où notre modèle économique produit les effets les plus dévastateurs : ailleurs dans le monde, où le système alimentaire mondial détruit la souveraineté alimentaire des pays les plus fragiles, et ici, où notre modèle précarise les agriculteurs, où les inégalités alimentaires affectent la santé des personnes et augmentent la mortalité des populations les plus précaires.
En bref, l'humanité est actuellement confrontée à un complexe de crises : environnementales, sociales, économiques, énergétiques qui sont interdépendantes. Notre modèle agricole est responsable d'une partie des problèmes à l'origine de ces crises. On est ce que l'on mange disait Feuerbach. De même, nous pensons qu'une société est le reflet de son agriculture et de son alimentation. La source des problèmes de notre société s'y trouve, mais également le début de la solution ! 

Une agriculture respectueuse de l'environnement 

L'un des crises les plus importantes que nous devons surmonter est la crise environnementale. Réchauffement climatique, épuisement des ressources et érosion de la biodiversité : l'agriculture conventionnelle est responsable de nombres de problèmes dans cette crise ; il est possible - heureusement - de proposer quantités de solutions !
Au niveau mondial, l'agriculture conventionnelle représente 24% des émissions de gaz à effet de serre (environ 20% en France), elle est donc pour bonne partie à l'origine du réchauffement climatique. Ces émissions sont principalement dues aux techniques d'élevage et à la production d'engrais de synthèses. Pour lutter contre le changement climatique, il est obligatoire de lutter contre l'élevage intensif, donc de revoir la place des protéines d'origine animale dans notre alimentation, et de promouvoir les changements de pratiques agricoles visant à éliminer à terme l'utilisation des engrais de synthèse. Accompagner le changement des pratiques vers une agriculture respectueuse de l'environnement est indispensable pour diminuer les impacts négatifs du changement climatique : des sols agricoles restaurés et bien entretenus, le semis sous couvert, l'agroforesterie et les prairies permanentes pour un élevage extensif, par exemple, sont à même d'entraîner une séquestration du CO2.

Notre modèle agricole actuel est dramatiquement consommateur de ressources alors que celles-ci se font de plus en plus rares. Nous sommes dans un monde fini et l'agriculture aussi doit s'adapter à cette réalité.
Les petits ruisseaux qui parcouraient nos campagnes disparaissent illustrant les prélèvements inconsidérés sur ce bien commun qu'est l'eau. Ressource qui bien que renouvelable ne doit pas être dilapidée par quelques-uns aux mépris de l'intérêt global. Il est impératif de changer de paradigme ! Encore une fois, cela passe par la forte réduction de l'élevage intensif, notamment celui destiné à l'export, le développement des espèces culturales économes en eau et la réduction drastique de l'utilisation des produits de synthèse pour préserver la qualité de l'eau.
Notre agriculture est également dopée au pétrole. Il faut actuellement 7 calories énergétiques pour produire 1 calorie alimentaire, notre conception de l'innovation et de l'efficacité est-elle vraiment là ? Ce modèle est-il véritablement résilient alors même que l'on s'interroge sur les stocks de pétrole mondiaux ? Il est vital de réduire la dépendance de notre agriculture au pétrole et de développer d'autres manières de produire.
Une autre ressource, qui peut sembler immuable, disparaît à vitesse grand V : les sols agricoles. Chaque année, en France, 82 000 hectares de terres agricoles disparaissent, l'équivalent d'une réduction du potentiel de production d'une centaine de milliers de tonne de blé ! C'est pourquoi nous nous engageons pour la protection des sols agricoles, symbolisée par la lutte contre les grands projets inutiles. Il est nécessaire de mettre en oeuvre un nouvel urbanisme, mais aussi une nouvelle vision de l'habitat rural, en adéquation avec la préservation de la capacité nourricière des territoires, l'augmentation de la population et le déplacement des personnes.

Les études s'accumulent sur la participation de l'agriculture conventionnelle chimique à la 6ème extinction de masse de la biodiversité : oiseaux, insectes, pollinisateurs, grands singes… On ne compte plus les espèces qui sont menacées chez nous ou ailleurs par notre modèle alimentaire et agricole. L'humain doit repenser sa relation à la nature. Un premier pas serait que l'agriculture se fasse protectrice de la biodiversité. La mise en place d'aménagements agro-écologique, haies ou talus, la biodiversité cultivée des semences paysannes, les races locales, la polyculture-élevage, l'agroforesterie, les associations culturales et la préservation de la biodiversité des sols, sont autant de techniques qui construisent un paysage pérenne pour une agriculture génératrice de diversité écologique et de bien-être animal. Bien plus résiliente et adaptée aux changements à venir qu'une "agriculture OGM" hors de toute réalité. Il est de plus impératif de stopper l'usage de substances chimiques dont l'impact sur la biodiversité est avéré. C'est pourquoi nous défendons notamment la fin des néonicotinoïdes sous toutes leurs formes. Il est indispensable de tout mettre en œuvre pour accompagner d'une part les agriculteurs en conversion vers l'agriculture biologique, sans oublier de soutenir ceux qui sont déjà dans ce modèle, et d'autre part les éleveurs en conversion pour plus de respect du bien être animal : fin de l'élevage intensif hors-sol avec interdiction de l'élevage en cage, promotion des élevages extensifs et ses pâturages herbagers naturels.
Que ce soit sur le changement climatique, la préservation des ressources, de la biodiversité ou le bien-être animal, l'agriculture ne peut se passer de la recherche scientifique. Celle ci doit se réorienter pour se mettre au service de ce modèle agricole plus respectueux de l'environnement et travailler en collaboration avec les paysan.ne.s.

Une agriculture respectueuse des hommes

Que serait le respect de l'environnement sans le respect de celles et ceux qui construisent notre modèle agricole, paysan.ne.s et consommateur.trice.s ?
Comme nous le disions en introduction, nous sommes ce que nous mangeons. À l'heure où la recherche commence à découvrir des liens entre notre estomac et notre cerveau, il est plus urgent que jamais de passer à une agriculture exempte de produits chimiques et qui respecte la santé humaine. Ceci est valable pour l'agriculture mais aussi pour l'agroalimentaire qui n'a eu de cesse d'augmenter les teneurs en sel, gras et sucres de nos aliments pour décupler ses profits, tout en maintenant un flou artistique sur l'étiquetage, permettant sans vergogne de tromper le consommateur.
L'élevage intensif est également une problématique importante de santé publique. Il n'y a pas que les animaux qui y souffrent ; notre santé est également mise en danger. Au-delà d'affecter la qualité et la valeur nutritionnelle, l'entassement d'animaux par centaines voire milliers est propice aux maladies transmissibles, qui peuvent même muter en souches plus dangereuses encore. Les employés dans les élevages sont particulièrement exposés et peuvent aussi jouer un rôle de passerelles de transmission des infections des animaux au grand public. Les antibiotiques sont très largement surutilisés dans les élevages (ils représentent 63 % des consommations d'antibiotiques en France et ils sont trop souvent administrés de manière préventive, et dans 91,6 % des cas sous la forme de traitements groupés, c'est-à-dire aussi bien aux animaux malades qu'aux animaux sains). Et pourtant, la lutte contre l'antibio-résistance est un défi majeur et mondial de santé publique dans la mesure où la perte d'efficacité des antibiotiques impacte la santé humaine, la santé animale et celle des écosystèmes. C'est pourquoi nous répétons notre opposition aux élevages intensifs hors-sol et nous nous positionnons en faveur de l'arrêt de l'usage préventif d'antibiotiques, l'interdiction de l'utilisation des antibiotiques les plus critiques en médecine vétérinaire ainsi que la fin des incitations financière à la prescription d'antibiotiques.

Les agriculteurs sont en première ligne face aux dangers des pesticides. Les preuves sont de plus en plus nombreuses en faveur de la reconnaissance de leurs impacts. C'est pourquoi la transition vers une agriculture agro-écologique est une nécessité vitale pour les agriculteurs.
Mais les pesticides et leurs dangers ne sont pas la seule problématique rencontrée par les paysans. En effet, le métier souffre d'un cruel manque de reconnaissance, économique d'abord et social ensuite. Nous souhaitons mettre tout en œuvre pour la revalorisation du métier de paysan, pour que la tendance s'inverse et que le monde agricole redevienne un secteur fortement créateur d'emplois, avec à la clef un réinvestissement des territoires ruraux. Il est inadmissible d'accepter que ceux qui nous nourrissent ne puissent pas vivre correctement de leur travail et que le taux de suicide dans la profession soit si lourd ! La généralisation des circuits courts, avec des intermédiaires maitrisés localement, augmente d'autant la part qui revient au paysan, artisans et commerçants locaux. Elle offre une véritable reconnaissance sociale au paysan qui retrouve le sens de son métier par le contact avec ceux qu'il nourrit. Cette revalorisation sociale passe aussi, comme dans d'autres secteurs de la société, par des droits sociaux améliorés : meilleures retraites, retour du droit au répit...
La question de la souveraineté technologique des paysans doit également être posée. Un paysan obligé d'acheter sa semence chaque année ne peut pas adapter ses plantes à son terroir et aux besoins des consommateurs. De même, un paysan bloqué dans un modèle qui pousse à l'achat de matériel non modifiable, à la technologie très poussée mais non adaptée à ses besoins ne peut pas mettre en place les techniques nécessaires à la transformation de son système de culture vers plus de résilience. Ainsi, la conception intégrée sur les territoires et l'auto-construction sont des initiatives indispensables à soutenir pour que les paysans disposent des outils dont ils ont réellement besoin pour cultiver de façon écologique et humaine.
Réhabiliter le métier de paysan, c'est aussi repenser la formation agricole en l'adaptant aux changements actuels et futurs du modèle agricole. Positionnons-nous pour que les paysans soient à nouveau ceux qui nous nourrissent sainement et les architectes de nos paysages !

Le modèle agricole actuel a démontré qu'il détruisait la nature et les hommes. L'urgence du changement se fait ressentir partout, la transition vers le modèle agro-écologique et paysan que nous défendons est maintenant plus que nécessaire. Ce modèle n'est pas bâti sur des vœux pieux mais repose sur des réalités déjà expérimentées partout sur le territoire par des hommes et des femmes désireux d'un autre avenir.
Ce changement des pratiques agronomiques et économiques ne serait rien sans un vrai renversement du système alimentaire mondialisé qui est à la source de l'agriculture conventionnelle, industrielle et chimique. Ce renversement passe par la mise en place de systèmes alimentaires territoriaux que nous défendons. Pour approfondir cette question nous vous invitons à consulter la deuxième partie de cet article.


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Espace Idées - Génération•s - Espace Idées - Une alimentation locale par tous et pour tous

Pour faire face aux multiples crises que subit notre modèle agricole et à travers lui notre société toute entière nous défendons à Génération.s une agriculture agro-écologique et paysanne. Dans un précédent document nous avions développé en quoi ce r

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Commentaires 4

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Yves Contassot le vendredi 15 février 2019 13:25

Bonjour je me permet de signaler que ce texte a été produit par le comité Agriculture & Alimentation et non par le comité Villes et Territoires Durables

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Bonjour je me permet de signaler que ce texte a été produit par le comité Agriculture & Alimentation et non par le comité Villes et Territoires Durables
Yannis Administrateur le vendredi 15 février 2019 14:52

C'est corrigé.
Je vous prie de nous excuser pour cette erreur (bis)...

Question complémentaire : quelle est la 2ème partie de cet article (ainsi je pourrais mettre le lien directement).

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C'est corrigé. Je vous prie de nous excuser pour cette erreur (bis)... Question complémentaire : quelle est la 2ème partie de cet article (ainsi je pourrais mettre le lien directement).
Yves Contassot le vendredi 15 février 2019 18:23

Pas de soucis ! bravo pour la réactivité
Le deuxième article est celui sur lequel j'avais aussi laissé un commentaire : https://idees.generation-s.fr/pole-zero-carbone/zero-carbone/une-alimentation-locale-par-tous-et-pour-tous-1.html

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Pas de soucis ! bravo pour la réactivité ;) Le deuxième article est celui sur lequel j'avais aussi laissé un commentaire : https://idees.generation-s.fr/pole-zero-carbone/zero-carbone/une-alimentation-locale-par-tous-et-pour-tous-1.html
Yannis Administrateur le samedi 16 février 2019 17:35

Voilà. C'est fait.
Enfin, à noter que sur ce nouveau site, on peut faire des articles avec des présentations un peu complexes, avec illustrations... Un peu comme celui ci : https://idees.generation-s.fr/pole-zero-carbone/zero-carbone/les-enjeux-du-stockage-de-l-eau-en-agriculture.html

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Voilà. C'est fait. Enfin, à noter que sur ce nouveau site, on peut faire des articles avec des présentations un peu complexes, avec illustrations... Un peu comme celui ci : https://idees.generation-s.fr/pole-zero-carbone/zero-carbone/les-enjeux-du-stockage-de-l-eau-en-agriculture.html

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